Les «Cahiers du cinéma» en danger

LIBERATION
QUOTIDIEN : jeudi 24 avril 2008


Rebonds
Par Chantal Akerman, Olivier Assayas, Alain Bergala, Pascal Bonitzer, Freddy Buache, Emmanuel Burdeau, Jean-Claude Carrière, Jean-Louis Comolli, Jean-Michel Frodon, Anne-Marie Garat, Benoît Jacquot, Thierry Jousse, Pascal Kané, André S. Labarthe, Bernard Latarjet, Serge Le Péron, Jean Narboni, Dominique Paini, Claudine Paquot, Nicolas Philibert, Jacques Rivette, Jean-Henri Roger, Eric Rohmer, Serge Toubiana, Les Amis des Cahiers du cinéma….


Le Monde vient de prendre brutalement la décision de se séparer des Editions de l’Etoile. Le titre Cahiers du cinéma est donc en vente, et de ce fait en danger ; surtout dans le contexte de crise générale de la presse écrite, même si la revue maintient avec une belle stabilité le niveau de ses ventes en kiosque et de ses abonnements.

Les Amis des Cahiers, dont nous sommes membres, ont à cœur de faire entendre leur voix dans ce moment critique, rappeler leur attachement à cette revue et l’attention qu’ils portent à sa pérennité, comme ils ont toujours su le faire chaque fois que son identité s’est trouvée fragilisée. Ils sont une société d’actionnaires des Editions de l’Etoile, actionnaires «historiques» réunissant à la fois des cinéastes, des acteurs, des personnalités du monde cinématographique et culturel, des rédacteurs et des salariés de la revue à toutes les époques de son histoire. Tous se sont sentis impliqués, à un moment ou à un autre, dans le présent des Cahiers du cinéma, et continuent à se sentir engagés dans sa permanente évolution. Cette société, minoritaire par rapport à l’actionnaire principal actuel, est liée avec le Monde par un pacte d’associés qui lui donne un droit de consultation sur tout changement important pouvant affecter l’identité des Cahiers du cinéma.

C’est une revue unique dans son genre, qui appartient à l’histoire du cinéma à laquelle elle contribue depuis les années 50. Fondée par André Bazin et Jacques Doniol-Valcroze, elle a été le creuset de la Nouvelle Vague, le lieu où Truffaut, Godard, Chabrol, Rohmer, Rivette et tant d’autres ont exercé, chacun à leur manière, leur talent critique. Son passé prestigieux constitue un atout fondateur, mais elle a toujours su rester synchrone, depuis cinquante ans, avec le cinéma en train de se faire. Grâce au prestige international dont elle jouit, et qui ne s’est jamais démenti, elle contribue au rôle culturel de la France dans le domaine du cinéma. Elle est un lieu d’échanges et de débats entre tous ceux qui font le cinéma, ici et ailleurs. Elle a contribué à l’émergence de nombreux réalisateurs, partout dans le monde, qui y ont trouvé une première reconnaissance de leur talent. Elle a souvent été un tremplin à leur carrière. Les Cahiers sont associés à de nombreux festivals, petits et gros, pour se tenir toujours aux avant-postes du cinéma au présent. Le site Internet de la revue est à la fois, aujourd’hui, un précieux espace de ressources patrimoniales en ligne, et un espace d’échanges et de débats en temps réel à la pointe vive de l’actualité.

La photothèque des Cahiers du cinéma, l’une des plus riches dans le domaine, contribue à une présence très large du titre dans l’ensemble de la presse française et étrangère et joue un rôle précieux de conseil en iconographie dans le champ de l’édition de livres et de magazines.

Les Editions de l’Etoile sont devenues, au fil des ans, la principale maison d’édition de livres de cinéma en France et le rayonnement intellectuel des Cahiers du cinéma est largement porté, dans le monde entier, par ses livres coédités ou traduits par des éditeurs étrangers. Son patrimoine éditorial s’est imposé depuis vingt-cinq ans comme un précieux capital de pensée et de ressources sur le cinéma.

Dans la situation actuelle, créée par la décision de l’actionnaire principal de mettre en vente les Editions de l’Etoile, les Amis des Cahiers entendent défendre avec vigueur le périmètre d’activités de la maison d’édition (revue, éditions, photothèque, site Internet). Ils s’opposeront également à tout dévoiement de l’identité du titre Cahiers du cinéma. Non seulement la revue est indispensable pour la pensée critique, de plus en plus menacée par ailleurs, mais elle doit rester fidèle à elle-même et à ses convictions, dans cet avenir qui est en passe de se décider pour les Editions de l’Etoile. En tant qu’actionnaires du titre, nous entendons participer au choix du repreneur et jouer pleinement notre rôle de vigilance et de conseil. On l’aura compris : nous sommes disponibles pour tout dialogue constructif avec les éventuels repreneurs des Editions de l’Etoile sur le devenir à inventer des Cahiers du cinéma.

Les Cahiers du Cinéma dans la tourmente

Business
Jeudi 24 avril 2008


La revue de cinéma française Les Cahiers du cinéma est cédée par le groupe Le Monde, actuellement engagé dans un plan de redressement. De son côté, le magazine professionnel Écran Total, placé en liquidation judiciaire, attend son repreneur.

Mise à jour
Alors que Les Cahiers du cinéma se trouvent actuellement en vente, Les Amis des Cahiers, actionnaire minoritaire de la revue qui compte parmi ses membres Olivier Assayas et Eric Rohmer, veulent participer au choix du repreneur du mensuel que Le Monde entend céder, ont-ils indiqué dans une tribune publiée le jeudi 24 avril dans Libération : "Les Amis des Cahiers, dont nous sommes membres, ont à coeur de faire entendre leur voix dans ce moment critique, rappeler leur attachement à cette revue et l'attention qu'ils portent à sa pérennité", affirment-ils dans cette tribune, signée notamment par les cinéastes Chantal Akerman, Benoît Jacquot, Jacques Rivette, Olivier Assayas et Eric Rohmer. Les Amis sont ainsi liés avec Le Monde, actionnaire majoritaire, par un "pacte d'associés qui lui donne un droit de consultation sur tout changement important pouvant affecter l'identité des Cahiers du Cinéma", rappellent-ils. "Non seulement la revue est indispensable pour la pensée critique, de plus en plus menacée par ailleurs, mais elle doit rester fidèle à elle-même et à ses convictions", affirment-ils.


Actuellement empêtrée dans des difficultés financières, la direction du Monde a engagé, outre son plan de redressement prévoyant 130 suppressions d'emplois au quotidien, des cessions de magazines dont celle des Cahiers du Cinéma. Rappelons que la revue, créée en 1951, a vu de jeunes cinéphiles tels Jean-Luc Godard, François Truffaut, Chris Marker ou encore Claude Chabrol y écrire leurs premières fiches de films avant de devenir de grands cinéastes. Les salariés et journalistes des Cahiers du Cinéma ont affirmé, suite à cette annonce, leur "forte inquiétude", et demandent à être "informés en temps réel" de toute négociation concernant leur avenir. Les salariés des Cahiers rappellent en outre que leur titre représente aujourd'hui une revue de cinéma, mais aussi "la première maison d'édition de livres sur le cinéma en France, des sites internet, une photothèque riche de 350.000 documents et une collection de DVD." "L'ensemble de ces activités ne peut être considéré d'un simple point de vue comptable", concluent-ils, affirmant que les Cahiers du Cinéma ont été un "acteur majeur de la vie culturelle française depuis leur création en 1951."

Ecran Total attend son futur repreneur


Le magazine Ecran Total connaît également de graves ennuis financiers. Placé en liquidation judiciaire le 20 mars dernier, le "magazine de tous les professionnels de l'audiovisuel" intéresserait quatre sociétés, qui se seraient portées candidates à sa reprise. Trois entreprises auraient été retenues par l'administrateur judiciaire, la quatrième ne proposant de ne reprendre que trois des vingt-six salariés d'Écran Total. La première serait les Editions Larivière (Moto revue, Rock & folk), qui publient aussi des titres professionnels comme Musique Info Hebdo ou Fashion Daily News. La seconde serait la Financière des Loisirs, qui a repris l'édition du mensuel de cinéma L'Écran Fantastique en septembre 2007. Enfin, le cabinet de conseil spécialisé sur le secteur audiovisuel NPA Conseil aurait également formulé une offre. Le choix du repreneur devrait être annoncé par le Tribunal de Commerce de Nanterre le 24 avril prochain.

Aline Honigmann avec AFP et Imédias

Christine Albanel défend le projet d'un ministère allégé et resserré

CLARISSE FABRE
LE MONDE
QUOTIDIEN : 19 avril 2008


Le nouveau visage du ministère de la culture et de la communication se dessine. Transformé, resserré, allégé, sous l'effet de la "révision générale des politiques publiques", dite RGPP, qui s'applique à tous les ministères. Les relations se tendent entre la ministre, Christine Albanel, et les syndicats qui se réunissaient, jeudi 17 avril, lors d'un comité mixte paritaire ministériel.

Mme Albanel a empêché les manifestants anti-RGPP de se rassembler, le même jour, sous les fenêtres du ministère, au milieu des Colonnes de Buren, dont l'accès était bloqué. La ministre n'avait guère apprécié, entre autres, que les syndicats occupent l'antichambre de son bureau, début avril.

Dans une lettre ouverte, Anne Hidalgo, secrétaire nationale culture et médias du PS, et Claudy Lebreton, président de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains, déplorent une logique "d'économies comptables et de réduction du nombre des fonctionnaires" et demandent un "moratoire de six mois" sur la RGPP. Peine perdue : la nouvelle administration doit être "opérationnelle à compter de 2009", indique le communiqué de la ministre. "En deux ou trois mois, on efface des années de réflexion et de construction du ministère", s'indigne le secrétaire général de la CGT-culture, Nicolas Monquaut.

Mme Albanel estime avoir sauvé les meubles : un, le réseau des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), qui gèrent les crédits déconcentrés de l'Etat, est préservé, même si des interrogations subsistent sur le devenir de ses missions ; deux, la ministre a annoncé, jeudi 17 avril, que la Direction du développement des médias, qui dépend de Matignon, sera rattachée à la future direction générale des industries culturelles et des nouveaux médias - l'intitulé définitif n'est pas encore connu. "Le conseil de modernisation des politiques publiques (piloté par l'Elysée et Matignon) conforte ainsi le ministère dans ses missions et son organisation", assure-t-elle.

Trois piliers : patrimoine, création, médias. Trois directions générales verront le jour (au lieu de dix directions actuellement) au sein du ministère, auxquelles s'ajoute un secrétariat général. Une direction générale des patrimoines de France englobera les quatre directions existantes (livre, archives, architecture et patrimoine, musées de France). Une direction générale de la création regroupera la délégation aux arts plastiques et celle consacrée au spectacle vivant (musique, danse, théâtre, etc.).

Troisième bloc, une direction générale du développement des médias et de l'économie culturelle : celle-ci devrait être pilotée par la responsable de la direction du développement des médias, Laurence Franceschini. Le ministère réfléchit par ailleurs à la nomination des deux autres directeurs généraux. Chaque direction générale sera dotée de directions correspondant aux différents secteurs. Les actuels directeurs pourraient être maintenus à leur poste : "Aucun d'entre eux n'a démérité", glisse un conseiller de Mme Albanel.

Machine arrière sur les musées. Le processus d'autonomisation des musées se poursuit. Aux quatre établissements publics existants (Louvre, Orsay, Versailles, Guimet), s'ajoutent trois nouveaux venus : le Musée Picasso à Paris, le Musée de Fontainebleau, enfin le musée et la Manufacture de Sèvres, deux entités distinctes qui sont désormais regroupées. Par ailleurs, le Musée de l'Orangerie ira sous l'aile d'Orsay. D'autres pistes envisagées en décembre 2007 ont été revues et corrigées, pour tenir compte des critiques syndicales : ainsi, il n'est plus question de rattacher administrativement les autres musées à la Réunion des musées nationaux (RMN), qui gère diverses activités (billetterie, édition, produits dérivés). Il s'agirait simplement, aujourd'hui, de "rénover" les liens entre la RMN et les musées. Ces derniers relèveraient toujours de la direction des musées de France pour ce qui est de la politique scientifique.

215 postes supprimés en 2008. En 2008, 215 emplois équivalent temps plein seront supprimés (sur un total de 11 900 emplois de titulaires), dont 100 au titre du non-remplacement du départ à la retraite d'un fonctionnaire sur deux. Si la filière accueil et surveillance est épargnée, d'autres secteurs seraient touchés : la direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA) perdrait 101 postes (sur 2 824), selon un premier état des lieux, "pas encore arbitré", assure-t-on au cabinet de Mme Albanel.

Dans une lettre adressée à Jean-François Hébert, le directeur de cabinet de Mme Albanel, que Le Monde s'est procurée, le directeur de la DAPA, Michel Clément, estime que ces perspectives, alliées à la "baisse programmée" de certains services déconcentrés, sont "de nature à poser la question du maintien du périmètre des missions fondatrices de notre ministère".

Clarisse Fabre
Article paru dans l'édition du 19.04.08 du journal Le Monde

L'avenir en pointillés des Cahiers du Cinéma

Comme au cinéma
le 09 Avril 2008
(avec Le Film Français)

La presse quotidienne va mal, les journaux ne cessent de licencier et le cinéma pourrait d’ores et déjà largement en pâtir. Le journal Le Monde a ainsi présenté vendredi dernier son « plan de redressement » qui prévoit le licenciement de 130 emplois au sein des « entités déficitaires ou non stratégiques ».

La restructuration du quotidien français le plus célèbre prévoit de « restaurer l’équilibre du quotidien et de ses suppléments à échéance 2010 ». D’ici là, le groupe Le Monde serait un chantier permanent permettant d’économiser la somme non négligeable de 15 millions d’euros sur une période de deux ans.

Parmi les 130 emplois qui seront supprimés, 2/3 d’entre eux devraient être des journalistes…(hum) mais pire encore, le « plan de redressement » envisage de céder Fleurus Presse (groupe d’éditions Jeunesse), le mensuel Dancer, le réseau La Procure, librairies spécialisées en presse religieuse et surtout les Editions de l’Etoile. C’est la société éditrice des Cahiers du Cinéma.

Un tollé dans la presse cinématographique. Fondée par André Bazin, Les Cahiers du Cinéma, c’est la revue spécialiste par excellence qui éclaire depuis plus de 40 ans et d’un œil savant l’ensemble des sorties ciné. Révolutionnant la notion de critique ; les rédacteurs des Cahiers du Cinéma participent à des colloques, des rencontres entre publics et réalisateurs, visibles dans certains bonus DVD, certains d’entre eux sont aussi devenus réalisateurs… et ce n’était pas pour faire de la figuration. François Truffaut, Jean-luc Godard, Eric Rohmer, Jacques Rivette, Chris Marker et Claude Chabrol, et plus récemment André Téchiné, Christophe Honoré et Olivier Assayas sont passés par les Cahiers avant de se lancer dans la réalisation.

L’UJC (Union des Journalistes de Cinéma) manifeste toute son inquiétude. L’association précise que « ce désengagement regrettable intervient au plus mauvais moment, alors que la presse de cinéma traverse actuellement une crise profonde ». Les Cahiers adoptent un point de vue qui ne peut bien sûr pas plaire à tout le monde, mais leurs compétences non plus à être démontrées. Ils offrent un angle essentiel au débat critique français, et il est important pour tout amateur de cinéma (même ceux qui tremblent devant le meilleur du pire des séries B néo-zélandaises) que Les Cahiers du Cinéma continuent son travail. L’UJC indique qu’elle se montrera « particulièrement attentive dans les jours et les semaines qui viennent à l’évolution de la situation des éditions de l’Etoile et des Cahiers du Cinéma dont l’avenir doit impérativement être assuré ».

Une solidarité que nous saluons, évidemment.

F.B.

Club des 13 : Christine Albanel au rapport

DIDIER PÉRON
LIBERATION
QUOTIDIEN : mercredi 9 avril 2008


Irritation. La ministre a commenté dans la presse le texte du collectif avant même de l’avoir reçu.


Le rapport rédigé par le Club des 13 (Libération du 28 mars), groupe de réflexion interprofessionnel né sous l’impulsion de la cinéaste Pascale Ferran, a été remis à Christine Albanel, jeudi 3 avril, par une délégation élargie (avec notamment Cédric Klapisch, Nicole Garcia, Bertrand Tavernier…). Mais les problèmes ont commencé dès le lendemain, avec la parution, dans l’hebdo le Film français, d’un entretien avec Christine Albanel sur les mesures préconisées par un autre rapport (Cinéma et concurrence, d’Anne Perrot et Jean-Pierre Leclerc, commandité par le ministère celui-là), dans lequel la ministre de la Culture en profitait pour commenter les conclusions et propositions du rapport du Club des 13.

«Un rapport intéressant», dit-elle, mais «qui passe un peu vite sur ces dernières années, où le paysage a commencé à se rééquilibrer, comme en témoignent les derniers chiffres du CNC [Centre national de la cinématographie]». Comme les 200 pages du rapport des 13 pointent plutôt un déséquilibre croissant entre gros et petits, riches et pauvres, on ne sent pas poindre une grande convergence sur le diagnostic. La ministre, interrogée sur la mise en cause des diffuseurs (télévisions, multiplexes et bientôt opérateurs de téléphonie…) dans la dégradation des mode de production et l’uniformisation des films, répond : répond : «qui passe un peu vite sur ces dernières années, où le paysage a commencé à se rééquilibrer, comme en témoignent les derniers chiffres du CNCLe cœur du rapport concerne les relations étouffantes entre le cinéma et les diffuseurs. Rappelons que c’est un système que toute l’Europe nous envie. Dire qu’il ne permet pas l’audace et que tous les films sont formatés me paraît un peu exagéré. […] Je pense que nous devons soutenir tous les cinémas. Ce serait le rêve des Américains de se réserver le cinéma de divertissement et de nous cantonner au "cinéma d’auteur". Nous avons aussi besoin des Ch’tis, qui conduisent toutes les générations en salles.»

Comme on pouvait s’y attendre, cette réaction à chaud a surpris les membres du Club des 13, lesquels se sont fendus dans l’urgence d’un communiqué de presse furax : «Nous avons été reçus très courtoisement par Mme Albanel, qui nous a dit avec circonvolution qu’elle nous répondrait plus longuement après avoir lu notre texte. Nous étions en parfait accord avec elle sur ce point. Quelques heures plus tard, nous apprenions, par voie de presse, qu’elle avait lu le rapport avant que nous ne lui remettions. Elle l’avait même tellement lu qu’elle l’avait déjà commenté pour le Film français, bien avant de nous recevoir pour nous dire officiellement qu’elle ne l’avait pas lu. Cette promptitude dans la réaction n’est pas sans évoquer le sapeur Camember, qui affirmait que si les pompiers arrivaient sur les lieux d’un incendie avant qu’il n’éclate, cela réduirait considérablement les risques. Par ses commentaires d’un rapport non lu ou sa réception officielle d’un rapport déjà lu, la ministre doit penser avoir maîtrisé les risques d’incendie. Nous pensons, à l’inverse, qu’en nous prenant assez ostensiblement pour des imbéciles, elle jette de l’huile sur le feu. Quel feu ? Celui qui se propage depuis des années et qui a pour noms perte de confiance et discrédit des hommes et des femmes politiques et de leur fonction au plus haut niveau de l’Etat.»

Cette colère ne fait qu’alimenter la poursuite de la constitution d’une chaîne de cosignataires supportant le rapport, plus de 150 désormais, dont une quarantaine de producteurs, des agents et des stars (Nathalie Baye, Fanny Ardant…).


Didier Péron
Libération, le 9 avril 2008