Christine Albanel défend le projet d'un ministère allégé et resserré

CLARISSE FABRE
LE MONDE
QUOTIDIEN : 19 avril 2008


Le nouveau visage du ministère de la culture et de la communication se dessine. Transformé, resserré, allégé, sous l'effet de la "révision générale des politiques publiques", dite RGPP, qui s'applique à tous les ministères. Les relations se tendent entre la ministre, Christine Albanel, et les syndicats qui se réunissaient, jeudi 17 avril, lors d'un comité mixte paritaire ministériel.

Mme Albanel a empêché les manifestants anti-RGPP de se rassembler, le même jour, sous les fenêtres du ministère, au milieu des Colonnes de Buren, dont l'accès était bloqué. La ministre n'avait guère apprécié, entre autres, que les syndicats occupent l'antichambre de son bureau, début avril.

Dans une lettre ouverte, Anne Hidalgo, secrétaire nationale culture et médias du PS, et Claudy Lebreton, président de la Fédération nationale des élus socialistes et républicains, déplorent une logique "d'économies comptables et de réduction du nombre des fonctionnaires" et demandent un "moratoire de six mois" sur la RGPP. Peine perdue : la nouvelle administration doit être "opérationnelle à compter de 2009", indique le communiqué de la ministre. "En deux ou trois mois, on efface des années de réflexion et de construction du ministère", s'indigne le secrétaire général de la CGT-culture, Nicolas Monquaut.

Mme Albanel estime avoir sauvé les meubles : un, le réseau des directions régionales des affaires culturelles (DRAC), qui gèrent les crédits déconcentrés de l'Etat, est préservé, même si des interrogations subsistent sur le devenir de ses missions ; deux, la ministre a annoncé, jeudi 17 avril, que la Direction du développement des médias, qui dépend de Matignon, sera rattachée à la future direction générale des industries culturelles et des nouveaux médias - l'intitulé définitif n'est pas encore connu. "Le conseil de modernisation des politiques publiques (piloté par l'Elysée et Matignon) conforte ainsi le ministère dans ses missions et son organisation", assure-t-elle.

Trois piliers : patrimoine, création, médias. Trois directions générales verront le jour (au lieu de dix directions actuellement) au sein du ministère, auxquelles s'ajoute un secrétariat général. Une direction générale des patrimoines de France englobera les quatre directions existantes (livre, archives, architecture et patrimoine, musées de France). Une direction générale de la création regroupera la délégation aux arts plastiques et celle consacrée au spectacle vivant (musique, danse, théâtre, etc.).

Troisième bloc, une direction générale du développement des médias et de l'économie culturelle : celle-ci devrait être pilotée par la responsable de la direction du développement des médias, Laurence Franceschini. Le ministère réfléchit par ailleurs à la nomination des deux autres directeurs généraux. Chaque direction générale sera dotée de directions correspondant aux différents secteurs. Les actuels directeurs pourraient être maintenus à leur poste : "Aucun d'entre eux n'a démérité", glisse un conseiller de Mme Albanel.

Machine arrière sur les musées. Le processus d'autonomisation des musées se poursuit. Aux quatre établissements publics existants (Louvre, Orsay, Versailles, Guimet), s'ajoutent trois nouveaux venus : le Musée Picasso à Paris, le Musée de Fontainebleau, enfin le musée et la Manufacture de Sèvres, deux entités distinctes qui sont désormais regroupées. Par ailleurs, le Musée de l'Orangerie ira sous l'aile d'Orsay. D'autres pistes envisagées en décembre 2007 ont été revues et corrigées, pour tenir compte des critiques syndicales : ainsi, il n'est plus question de rattacher administrativement les autres musées à la Réunion des musées nationaux (RMN), qui gère diverses activités (billetterie, édition, produits dérivés). Il s'agirait simplement, aujourd'hui, de "rénover" les liens entre la RMN et les musées. Ces derniers relèveraient toujours de la direction des musées de France pour ce qui est de la politique scientifique.

215 postes supprimés en 2008. En 2008, 215 emplois équivalent temps plein seront supprimés (sur un total de 11 900 emplois de titulaires), dont 100 au titre du non-remplacement du départ à la retraite d'un fonctionnaire sur deux. Si la filière accueil et surveillance est épargnée, d'autres secteurs seraient touchés : la direction de l'architecture et du patrimoine (DAPA) perdrait 101 postes (sur 2 824), selon un premier état des lieux, "pas encore arbitré", assure-t-on au cabinet de Mme Albanel.

Dans une lettre adressée à Jean-François Hébert, le directeur de cabinet de Mme Albanel, que Le Monde s'est procurée, le directeur de la DAPA, Michel Clément, estime que ces perspectives, alliées à la "baisse programmée" de certains services déconcentrés, sont "de nature à poser la question du maintien du périmètre des missions fondatrices de notre ministère".

Clarisse Fabre
Article paru dans l'édition du 19.04.08 du journal Le Monde